Date de publication du livre: 1873
Unique recueil de poèmes de Tristan Corbière, publié à compte d'auteur et qui passa inaperçu. Corbière, qui ne connut aucun succès de son vivant, sera révélé de manière posthume par Verlaine, qui lui consacre un chapitre de son essai Les Poètes maudits (1883).
Les Amours jaunes évoquent la grande ville moderne et la campagne bretonne, la fébrilité — ou la légèreté — amoureuse du poète et la vie virile des matelots, les légendes anciennes et les événements historiques de son époque. Mais cette diversité est « marquée au cachet de la force et d’une puissante originalité », comme il a été écrit dans l'un des rares comptes rendus des Amours jaunes lors de leur publication.
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Thèmes abordés: amour, femme, libération, mer, mort, paix, séparation, ville
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Extrait du recueil (Le naufrageur):
J’ai vu dans mes yeux, dans mon rêve,
La NOTRE-DAME DES BRISANS
Qui jetait à ses pauvres gens
Un gros navire sur leur grève…
Sur la grève des Kerlouans
Aussi goélands que les goélands.
Le sort est dans l'eau: le cormoran nage,
Le vent bat en côte, et c'est le Mois Noir…
Oh! moi je sens bien de loin le naufrage!
Moi j'entends là-haut chasser le nuage.
Moi je vois profond dans la nuit, sans voir!
Moi je siffle quand la mer gronde,
Oiseau de malheur à poil roux!…
J'ai promis aux douaniers de ronde,
Leur part, pour rester dans leurs trous…
Que je sois seul! – oiseau d'épave
Sur les brisans que la mer lave…
Oiseau de malheur à poil roux!
– Et qu'il vente la peau du diable!
Je sens ça déjà sous ma peau.
La mer moutonne!… – Ho, mon troupeau!
– C'est moi le berger, sur le sable…
L’enfer fait l'amour. – Je ris comme un mort –
Sautez sous le Hû!… le Hû des rafales,
Sur les noirs taureaux sourds, blanches cavales!
Votre écume à moi, cavales d'Armor!
Et vos crins au vent!… – Je ris comme un mort –
Mon père était un vieux saltin,
Ma mère une vieille morgate…
Une nuit, sonna le tocsin:
– Vite à la côte: une frégate! –
… Et dans la nuit, jusqu'au matin,
Ils ont tout rincé la frégate…
– Mais il dort mort le vieux saltin,
Et morte la vieille morgate…
Là-haut, dans le paradis saint
Ils n'ont plus besoin de frégate.
(Ranc de Kerlouan – Novembre)
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